A la fin du XVIe siècle, les Maroserana, dynastie établie depuis deux siècles dans le Sud-Ouest de l’île, fondent le royaume du Menabe en étendant leur territoire aux plaines de l’Ouest et en installant leur nouvelle capitale sur les rives de la Saka, affluent du fleuve Mangoky. Ainsi nait le plus vaste et le plus puissant royaume malgache qui domine l’île du XVIe au XVIIIe. Les rois Andriamisara et Andriandahifotsy dotent le Menabe (“Grand Rouge”, nom de ce nouveau royaume) d’une administration territoriale et d’institutions durables tout en menant une politique de conquêtes par des alliances ou grâce aux premières armes à feu achetées aux trafiquants européens et arabes. Des querelles de succession amènent plus tard le fils cadet d’ Andriandahifotsy à émigrer dans le nord-ouest pour fonder le royaume du Boina près de Mahajanga. Ce deuxième royaume sakalava étend par la suite son contrôle à la pointe nord de l’île et à une partie du nord-est. A la fin du XVIIIe siècle, la dynastie Maroserana contrôle ainsi plus du tiers de la Grande Ile. Maître des ports de la côte ouest, elle monopolise le commerce des armes à feu et la traite alimentée par des razzias dans l’intérieur. Mais, divisés par des rivalités familiales, le Menabe et le Boina subiront les premières attaques de leurs voisins merina au début du XIXe siècle. Ces derniers feront l’unité du pays quelques années plus tard en soumetttant l’ensemble des tribus malgaches dont les sakalavas. L’histoire des peuplades de l’ouest est donc riche et prestigieuse. Le passé glorieux des guerriers sakalava nourrit encore l’éducation des enfants de la tribu et justifie les grandes cérémonies réunissant les diverses branches de la tribu à Belo sur Tsiribihina, Morondava et Analalava. Les descendants des grandes familles royales du XIXe siècle règnent encore sur la tribu. A Morondava, c’est la dynastie des “Kamamy” qui domine le Menabe. A la pointe Nord du territoire des sakalava, c’est la reine Soazara qui commande les populations du Boina.

La grande cérémonie du Fitampoha ou “bain des reliques royales” réunit à Belo sur Tsiribihina les sakalava du Menabe. Cette fête sacrée a lieu tous les 5 ans en hiver austral. C’est une fête durant laquelle on lave les reliques des rois du Menabe pour renforcer la royauté Sakalava et les liens entre le roi actuel et ses sujets. Elle dure une semaine.
A Analalava, dans l’une des plus belles baies de la Grande Ile, une cérémonie similaire a lieu chaque année en l’honneur de la reine Soazara. Cette dame, aujourd’hui âgée de 80 ans, règne sur la tribu depuis une quarantaine d’années.
Le mot Analalava signifie “Où il y a une longue forêt” et désigne l’épais massif boisé qui borde la baie et s’étend au nord jusqu’à la presqu’île d’Ampasidava. Située à l’embouchure de la Loza, Analalava est bordée par une immense plage recouverte lors des grandes marées. Une ancienne jetée s’avance vers la mer et devient à chaque fin de journée le lieu de rencontre où l’on va « aux nouvelles » des arrivées. Boutres, goélettes et barques de pêche se mettent à quai pour y débarquer marchandises et passagers. Bourgade du bout du monde Analalava est une petite ville pleine de charme qui conserve une forte authenticité Sakalava.
Située en contrebas du phare sur les hauteurs de la ville, l’ancienne résidence du gouverneur est une vieille bâtisse de bois d’architecture coloniale. Hélas, elle n’est plus entretenue et menace de s’écrouler. Au Sud de la ville, le palais royal est une construction modeste en matériaux traditionnels entourée d’une palissade de pieux de bois. La demeure est moins prestigieuse que son occupante.
La reine Soazara occupe toujours une place importante dans la tradition et le respect des coutumes. Elle est une « Mpanjaka Be » Sakalava, soit une autorité de sang royal, descendante directe des anciens rois de la région. Malgré la modernité et l’exode de ses sujets vers le centre du pays, elle conserve une autorité traditionnelle importante, d’autant plus que la région est isolée. Ressortissants malgaches, pratiquants d’autres religions, soumis à l’autorité administrative du préfet de région, ses sujets lui vouent pourtant un culte fanatique. Chaque année, de grandes festivités sont préparées en son honneur et pour les ancêtres, accompagnées d’offrandes et de sacrifices. Elles ont lieu dans la semaine précédant la pleine lune d’août. Pour l’occasion, ils sont des milliers, venus des villages de la baie, des bourgades de la région mais aussi de la capitale.